Cela fait plus d’un an et demi que je n’ai pas voyagé. Je reprends l’avion pour la première fois dans le monde sous Covid 19, c’est étrange et presque surréaliste. Nous allons enfin commencer ce chantier de musée MIME à Ouidah et revoir nos clients.
Arrivée la veille tard dans la nuit moite et chaude de Cotonou, on se retrouve à l’hôtel. On ne sait pas trop si l’on peut sortir ou pas. En tout cas, suite au test Covid fait à l’aéroport, nos passeports ont été gardés, on ne pourra les récupérer que si notre test est négatif.
Nous effectuons notre première sortie, à pied sur le boulevard de la Marina, le long de la zone portuaire, refait complètement à neuf. Depuis un an et demi, les changements sont incroyable : la route et les trottoirs ont été complètement réaménagés, cela rend la circulation plus fluide. Quelques zems nous klaxonnent, nous refusons et continuons à pied. Nous marchons sous le cagnard, gros choc thermique et sensoriel pour nous. Il y a peu de monde, peu de circulation, ce n’est pas comme d’habitude, les élections présidentielles doivent y être pour quelque chose... nous nous dirigeons vers le marché Dantokpa. C’est la première fois que j’y mets les pieds, il y a pas mal de monde, les types de marchandises sont regroupées ensemble (épices, fruits et légumes, objets du quotidien ou d’hygiène), beaucoup de couleurs et de matériaux différents. Les tissus bariolés des femmes, des hommes et des enfants m’émerveillent. Je sors fébrilement mon mini carnet et je dessine en marchant, je découvre, je regarde, je m’imprègne de l’atmosphère grâce à mon crayon qui parcourt maladroitement le papier.
On a traversé une belle partie du marché et on arrive sur la lagune de Cotonou qui relie l’océan Atlantique au lac Nokoué, la vue est belle. Je m’assois pour peindre, les couleurs, les mouvements et la lumière si particulière. Des enfants m’entourent, ils sont de plus en plus près de moi, ils rigolent, ils me touchent, ils commentent ce que je suis en train de faire. En fait je ne sais pas trop car ils parlent fon, je crois. J’ai l’impression qu’ils aiment bien ce que je fais même si ils trouvent bizarre de me voir assise par terre à peindre le marché.
Pour rentrer, on prend un zem « cabine », ça tangue et ça bouge dans tous les sens mais le conducteur est agile.
Dans l’après-midi, je me ballade sur la plage où je retrouve mon spot
Obama Beach.
C’est lui et ses constructions en bois peint en bleu « Cotonou »
qui m’ont
poussé à ajouter le
« turquoise blue » dans ma palette. Le lieu s’est
sophistiqué, il y a désormais des jeux pour enfants, des tables et
des chaises. Les gens se retrouvent pour bavarder, prendre un verre
ou fêter des anniversaires.
Je m’attarde sur les ombres, les stries, les lumières de la palme qui jouent avec le bleu éclatant des palissades. Se baigner est tellement dangereux qu’il y a partout des écriteaux qui l’interdisent. En fait, tu n’as pas très envie d’y aller, ces eaux ont avalé trop de captifs avant leur départ sur les navires négriers… Je ne peux pas l’oublier.
[ aquarelles 21x60cm sur carnet aquarelle, 12x18 sur carnet – ©Marion Rivolier ]