jeudi 30 mars 2023

Retour sur l'exposition Art du Bénin au Palais de la Marina à Cotonou ...

J'ai eu la chance de participer à la scénographie avec l'agence Les Crayons de l'exposition “ Art du Bénin d’hier et d’aujourd’hui : de la restitution à la révélation ” au Palais de la Marina à Cotonou en 2022. J'ai travaillé sur les deux phases d'installation et d'accrochage, oeuvres patrimoniales et oeuvres contemporaines en janvier et février 2022.

La scénographie est en cours d’achèvement, il manque encore le graphisme et l’éclairage mais les vitrines sont prêtes. Avec l’équipe de conservation, nous passons quatre jours à installer les œuvres. Ils déballent ces objets, tant rêvés, les uns après les autres ; je les observe, je les détaille, j’en profite le temps qu’ils sont hors vitrine. Les conservateurs passent des heures à faire les constats d’état avant la fixation dans les vitrines et sur les socles.
C’est étrange, alors que je les ai vu des dizaines de fois, j’ai l’impression de les voir pour la première fois. Au contact de la lumière et des béninois, ils se rechargent d’une nouvelle puissance. Je redécouvre des motifs, des détails, des couleurs … les bochios sont comme vivants dans les mains de l’équipe. Je suis émue aux larmes. Chaque jour, chaque déplacement d’œuvre me réjouit. Enfin on touche au but, avec difficultés mais on y arrive. Chaque vitrine que l’on ferme est un pas de plus dans ce projet fou.


J’ai du mal à réaliser cette traversée faite ensemble. Aujourd’hui, les Trésors sont chez eux. De grands billboards à l’effigie des bochios se hissent partout dans la ville. Bientôt tout Cotonou pourra les découvrir. Je vois des larmes dans les yeux de celleux qui ne les ont jamais vus en vrai et qui les découvrent. Je sens leur émotion. Nous sommes tous touchés. Nous comprenons que nous participons à un moment historique. Rendre l’art et la culture aux béninois, alors que tout leur a été pris pendant la traite transatlantique est un juste retour des choses.
Retirer les forces vives mais aussi l’art et la culture, c’est priver la mémoire d’un peuple.

Pendant deux semaines, je participe à l’accrochage de l’exposition  qui présente une centaine d’œuvres contemporaines par 34 artistes béninois. Même si je me doutais de la richesse artistique du Bénin, je suis étonnée de découvrir autant de propositions artistiques. Leur art est emprunt de l’art de cour du royaume d’Abomey et de la culture vodun. Les matériaux, les couleurs, les motifs et les cultes sont une source d’inspiration forte. Les artistes s’en emparent pour interpréter les codes ( Glèlè, Tokoudagba, Pédé, Dossou, etc. ) ou pour les réinterpréter et en donner des formes nouvelles ( Hazoumé, Donoumassou, Aïsso, par exemple ). 

Observer, manipuler, mettre en relation les œuvres les unes avec les autres, de près ou de loin, expliquer aux socleurs comment maintenir les sculptures de Kouas ou accrocher les tableaux de Tchiff, me remplit. Ces moments partagés avec les équipes et certains des artistes sont tellement enrichissants qu’ils balaient toutes les difficultés que l’on peut rencontrer dans le montage de telles expositions.



La partie contemporaine de l'exposition est présentée en ce moment au musée Mohamed VI à Rabat au Maroc. Pour tout savoir sur son évolution, c'est sur le site dédié. 

[ croquis et aquarelles 30x40cm sur papier et 15x40cm sur carnet Moleskine – ©Marion Rivolier ]